Kura, ou quand deux Haïtiens redessinent le système monétaire mondial

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Ils ne réclament pas les feux des projecteurs. Ils les créent. Deux Haïtiens, Stephanie Joseph et Clifford Nau, bousculent aujourd’hui les codes de la finance globale grâce à Kura, une startup qui conjugue audace technologique et impact social concret. Dans un monde où les inégalités économiques persistent jusque dans les circuits monétaires, leur solution apporte une réponse claire, efficace, et enracinée dans les besoins des pays du Sud.

Kura est née d’un constat que vivent des millions de familles : envoyer de l’argent à ses proches dans les pays en développement coûte cher, prend du temps, et repose sur des infrastructures obsolètes. En 2023 seulement, les envois de fonds vers les pays à revenu faible ou intermédiaire ont atteint 669 milliards de dollars. Mais chaque dollar transféré est rogné par des frais bancaires, des taux de change défavorables et des délais injustifiés. Ce système pèse sur des foyers dont la survie économique dépend souvent de ces fonds. C’est ici que Kura intervient.

En utilisant l’USDC, une cryptomonnaie stable adossée au dollar américain, Stephanie Joseph et Clifford Nau proposent une alternative révolutionnaire : des paiements transfrontaliers instantanés, transparents, sécurisés et sans intermédiaires bancaires. Un parent vivant à New York peut ainsi envoyer de l’argent à sa famille en Haïti, au Honduras ou en République dominicaine, et cette somme peut être utilisée immédiatement, sans conversion, directement chez des commerçants locaux équipés de terminaux Kura. Le tout en s’appuyant sur la blockchain, pour garantir la traçabilité et la sécurité de chaque transaction.

Ce que Kura met en place dépasse la simple innovation technique : c’est une refondation complète du rôle des diasporas dans les économies locales. Le 2024 Circle Impact Report souligne que 800 millions de personnes dépendent des transferts de fonds, parfois jusqu’à 60 % de leur revenu familial. Une réduction de seulement 5 % des frais de transfert représenterait 16 milliards de dollars économisés par an — des milliards qui pourraient être réinjectés dans l’alimentation, l’éducation, la santé, et le logement. Kura agit donc comme un multiplicateur de pouvoir d’achat dans des zones traditionnellement délaissées par les grandes infrastructures financières.

L’entreprise a d’ailleurs été saluée par Circle, leader mondial des stablecoins, qui l’a sélectionnée comme finaliste du concours “Unlocking Impact” à Washington en 2024. Dans ses rapports officiels, Circle cite Kura comme une solution exemplaire alliant innovation monétaire et justice sociale. Une consécration internationale pour une vision née du génie haïtien.

Ce génie, justement, s’incarne dans le duo complémentaire formé par Stephanie Joseph et Clifford Nau, cofondateurs de Kura et architectes d’une nouvelle vision monétaire pour les économies émergentes. Stephanie Joseph cumule dix années d’expérience dans les services financiers, ayant occupé des postes de haut niveau chez Ernst & Young puis chez American Express, où elle s’est spécialisée dans les systèmes de paiements globaux. Son parcours professionnel est marqué par la direction d’initiatives stratégiques centrées sur la région Caraïbe et la gestion de produits pour des fintechs à forte croissance dans des marchés émergents, notamment au Kenya et en Afrique du Sud. Elle est diplômée d’un MBA de la Harvard Business School, formation qui parachève un profil à la fois analytique, visionnaire et opérationnel.

Clifford Nau, pour sa part, est un professionnel aguerri, avec quinze années d’expérience dans la conduite de la transformation numérique et l’adoption de l’innovation auprès des gouvernements caribéens, des associations professionnelles et des startups technologiques. Son travail s’est principalement concentré sur l’autonomisation des petites et moyennes entreprises à travers l’introduction de solutions technologiques adaptées à leurs réalités. Il est titulaire d’un MBA du MIT Sloan School of Management, d’un Executive Degree en stratégie d’inclusion financière de la Harvard Kennedy School, ainsi que d’un baccalauréat en économie appliquée obtenu au CTPEA, en Haïti.

Ensemble, ils forment une alliance stratégique entre rigueur, audace et engagement. Leur complémentarité donne à Kura une profondeur rare : à la croisée de la finance mondiale, des réalités locales et de l’innovation sociale, leur vision haïtienne s’impose aujourd’hui comme une référence dans le futur des paiements transfrontaliers.

Face aux grandes manœuvres des multinationales de la finance, Kura agit avec humilité mais détermination. Elle ne demande pas sa place dans la révolution numérique — elle la crée. Avec des racines haïtiennes, une envergure internationale, et une foi absolue dans la capacité des peuples à s’autonomiser, cette startup réinvente le rôle de la diaspora non plus comme soutien passif, mais comme acteur central du développement économique local.

Ce que bâtissent Stephanie Joseph et Clifford Nau, c’est un modèle de dignité monétaire, une réponse haïtienne à une injustice mondiale. Et ils nous rappellent qu’en matière d’innovation, le talent n’a pas de frontières — mais il peut avoir une âme.

Nou se rasin. Nou se vizyon. Nou se avni.

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