Google sanctionné pour monopole publicitaire : la justice américaine frappe fort

La domination de Google dans l’univers de la publicité en ligne vient de recevoir un coup d’arrêt retentissant. Dans une décision qui fera date, la juge fédérale Leonie Brinkema, du district de Virginie, a statué que le géant technologique a illégalement bâti sa puissance monopolistique sur le marché de la publicité numérique. Ce jugement, fruit d’un long bras de fer engagé par le département de la Justice des États-Unis, pourrait redessiner les fondations économiques du web moderne.
La partie du modèle économique visée représente à elle seule 31 milliards de dollars : il s’agit de la « pile technologique » (tech stack) qui permet d’interconnecter les éditeurs de sites aux annonceurs via des enchères automatisées d’espaces publicitaires. En combinant son serveur publicitaire (ad server) avec sa propre plateforme d’échange (ad exchange), Google a verrouillé le marché au détriment de la concurrence. Résultat : moins de choix pour les éditeurs, plus de contrôle pour Google, et une dynamique de marché profondément déséquilibrée.
La juge Brinkema a rejeté une partie des arguments du gouvernement – notamment ceux liés au réseau publicitaire pour les annonceurs –, mais elle a validé l’essentiel : Google a effectivement mis en place une structure qui « prive les rivaux de la possibilité de concourir » et nuit « aux clients éditeurs, au processus concurrentiel, et en fin de compte, aux consommateurs de l’Internet libre ». C’est une gifle pour le groupe californien, déjà ébranlé par d’autres affaires similaires : en moins d’un an, c’est la troisième fois qu’un tribunal fédéral reconnaît une infraction à la législation antitrust dans l’écosystème de Google — après son moteur de recherche et son Play Store.
Google, qui conteste la décision, s’est empressé de rappeler que ses outils sont « simples, abordables et efficaces » pour les éditeurs, tout en annonçant son intention de faire appel. Mais le mal est fait. Car au-delà de l’éventualité d’une obligation de démantèlement — peu probable selon certains experts du droit de la concurrence —, cette décision pourrait entraîner des restrictions durables sur les pratiques commerciales du géant, notamment sur la manière dont il tarifie ses services ou organise ses enchères publicitaires.
La portée symbolique est immense : elle offre un précédent juridique aux régulateurs du monde entier et galvanise les critiques de longue date des GAFAM. Pour Sacha Haworth, directrice du Tech Oversight Project, il s’agit d’une victoire éclatante pour le public américain : « Google a pendant des années imposé un impôt invisible sur tout ce que nous achetons en ligne, en étranglant l’industrie des médias. » Même son de cloche du côté de la sénatrice Elizabeth Warren, qui y voit un pas décisif vers le démantèlement des grandes plateformes numériques.
À l’heure où d’autres procès antitrust s’intensifient — à l’image de celui visant Meta pour ses acquisitions jugées anticoncurrentielles —, cette nouvelle défaite judiciaire de Google pourrait faire école. L’ère de l’impunité algorithmique semble s’effriter, pixel par pixel.
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